CORPUS HISTORIQUE ÉTAMPOIS
   
 
Compilation et appel à témoin
Valentin Feldman
prof de philo à Étampes
 
   
 Valentin Feldman  
Valentin Feldman (© Inconnu)
 
     Pierre-Frédéric Charpentier, qui prépare une thèse sur Les intellectuels français face à la guerre de 1939-1940, a eu l’amabilité de nous communiquer les données suivantes sur Valentin Feldman, dont le nom figure sur la plaque du collège Guettard (anciennement Collège, puis Lycée Geoffroy-Saint-Hilaire) parmi les anciens élèves et professeurs morts pour la France.
     Il semble que Feldman ait été quelque temps professeur de philosophie au collège d’Étampes. Merci à tous les Étampois qui auraient quelque donnée que ce soit sur ce professeur, par ailleurs militant communiste, de nous les communiquer, pour contribuer au devoir de mémoire que nous devons tous à ce héros, mort en criant: «Imbéciles, c’est pour vous que je meurs!».

Premières données sur Valentin Feldman

     Voici donc les premières données que nous a communiquées Pierre-Frédéric Charpentier:

Valentin Feldman (1909-1942).

     V. Feldman fut un jeune philosophe communiste auteur en 1936 d’un essai, L’Esthétique française contemporaine, et fut aussi professeur de philosophie dans plusieurs établissements, dont celui d’Etampes. Engagé volontaire en 1939 malgré une grave maladie de cœur, cité en 1940 pour sa conduite au feu, il s’était engagé dans la résistance dès l’été 1940. Arrêté au début de 1942, il fut condamné à mort, refusa de solliciter sa grâce et fut exécuté au Mont-Valérien en juillet 1942. Son nom figure parmi les 1006 noms du mémorial inauguré en 2003. Ses derniers mots, lancés aux soldats allemands du peloton qui allait le fusiller, sont restés dans les annales de la Résistance: «Imbéciles, c’est pour vous que je meurs!». De nombreux ouvrages les ont ainsi repris. Le journal de guerre de Valentin Feldman (1940-1941) s’apprête à être édité en 2006 aux éditions Farrago de Tours.

Pierre-Frédéric Charpentier
17 décembre 2004
   
     On notera incidemment que certains auteurs écrivent Feldmann avec deux N, mais que la mère de Feldman semblait elle-même, comme ses éditeurs, n’en mettent qu’un.

B. G.
DONNÉES BIBLIOGRAPHIQUES ÉPARSES
glanées sur Internet en décembre 2004

     Valentin FELDMAN, «Bolchévisme» [
«projet d’article»], in Revue de Synthèse historique V/2 (juin 1933), pp. ?-?.

     Ivan-Kapitonovich LUPPOL, Diderot. Ses idées philosophiques. Traduit du russe par V. et Y. Feldman [19 cm; 404 p.], Paris, Éditions sociales internationales, 1936.
 
     Valentin FELDMAN, L’esthétique française contemporaine [19 cm; 139 p.], Paris, Ferdinand Alcan, 1936 [dont au moins une traduction italienne en 1945].

     Nicolas OSTROVSKI [Nikolaï Alekseevitch OSTROVSKI, 1904-1936, romancier russe], Et l’acier fut trempé..., roman traduit du russe par V. Feldman & Paul Kolodkine [in-16 (18 cm); 324 p.; préface de Romain Rolland], Paris, Éditions sociales internationales [«Collection Ciment, publiée sous la direction de Renaud de Jouvenel»], 1937.
     Dont plusieurs rééditions (dont des éditions moscovites destinées à l’exportation): 1937, 1945 (318 p.; broché, Paris, Hier & Aujourd’hui, 1945), 1952, 1956, 1959, 2001.
     Dernière édition: Nikolaï Alekseevitch OSTROVSKI, Et l’acier fut trempé: roman. Nicolas Ostrovski,  traduit du russe par V. Feldman et P. Kolodkine; préf. de François Eychart; préf. de l’édition originale par Romain Rolland [20 cm; broché; 396 p.], Pantin, le Temps des cerises [«Romans des libertés»], 2001 [ ISBN 2-84109-233-X; 120 F en 2001].

     Henri BERR, «In memoriam (Marc Bloch - Valentin Feldman - Hélène Metzger)», in Revue de Synthèse, tome XIX - Revue de Synthèse Historique, tome LX - 1940-1945 [grand in-8° broché de 184 p. publié à Paris, Albin Michel («Centre International de Synthèse»), 1945], pp. ?-?.

     Valentin FELDMAN, L’estetica francese contemporanea [16 cm; 222 p.; traduction italienne de l’ouvrage de 1936], Milano [Milan], Alessandro Minuziano [« Estetica» 5], 1945.

     Esther FELDMAN [mère de Valentin Feldman], Mon fils Valentin Feldman, Paris, 1948 [ouvrage non conservé à la BNF, ni à la Bibliothèque du Congrès des Etats-Unis].

      Esther FELDMAN [mère de Valentin Feldman], Tu es immortel, mon fils [tirage limité numéroté à 500 exemplaires, comportant un court texte de Valentin Feldmann], France, 1949 [ouvrage non conservé à la BNF, ni à la Bibliothèque du Congrès des Etats-Unis, signalé par Mme Nicole Minot, qui a connu Mme Feldman].


     Esther FELDMAN [mère de Valentin Feldman], Dialogue Devant Ta Tombe [broché; 83 p.; photos noir et blanc; tirage limité numéroté à 400 exemplaires, préface de Jacques Rebersat, textes et poèmes d’Esther Feldman sur le destin de son fils], France, 1951 [ouvrage non conservé à la BNF, ni à la Bibliothèque du Congrès des Etats-Unis].

     José CORTI [éditeur], Souvenirs désordonnés (...-1965), Paris, José Corti, 1983 [dont une réédition dans la collection 10/18 en 2003].

     Recension du mercredi 17 décembre 2003 par «Mathilde» in Critiques ordinaires, critiques-ordinaires.ouvaton.org/article.php3?id_article=429, en ligne en 2004: «…Les absents, ces chers fantômes, marquent de leur empreinte tout le recueil: tour à tour sont évoqués ceux qui ont disparu trop tôt, emportés par la maladie ou la misère, et ceux qui furent victimes de la guerre, qui occupent une place centrale dans le récit: Benjamin Fondane, poète de vingt ans, Valentin Feldman, philosophe, Robert Desnos... et Dominique Corti, le fils unique, arrêté à dix-neuf ans par la Gestapo…»

     Michel TREBITSCH, «Valentin Feldman», in Jean MAITRON & Claude PENNETIER (dir.), Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français. Tome XXX, Paris, Éditions ouvrières et Presses de la FNSP, 1986, pp. ?-?.

     Jean-Luc GODARD [né en 1930], Le dernier mot [Clip de 27 mn pour le dixième anniversaire du Figaro Littéraire (N.B.: une page de la Cinémathèque donne: 12 mn)], 1988.

     Recension: CINÉ-CLUB DE CAËN [Association du personnel de l’INSEE Basse-Normandie; filmographie complète des 100 plus grands réalisateurs du cinéma et l’analyse détaillée de plus de 300 films], «Jean-Luc Godard», site.voila.fr/cineclub/realisat/godard/godard.htm, en ligne en 2004: «1988: Le dernier mot. — Clip de 27 mn [pour le dixième anniversaire du Figaro Littéraire. Cinq metteurs en scène doivent montrer la vie des français. Godard détourne la commande. Un visiteur se souvient d’une voix et d’images. Un violoniste lui répond par la Partita en ré de Bach. Le visiteur se souvient, ici en Haute-Savoie, à la fin de 1945, un prisonnier est fusillé par trois officiers allemands dont une femme. L’officier allemand cite des auteurs français: Nerval, Hugo, Musset, Turenne (à lui-même: tu tremblerais davantage si tu savais où je t’emmène), les ponctuant de "ma poule". On n’entend pas les questions mais le violoniste répond et le visiteur comprend que l’officier est son père et que le violoniste est le fils du prisonnier français. Le dernier mot de celui-ci avait été: "Imbéciles c’est pour vous que je meurs"; paroles dites par Valentin Feldman, fusillé à 33 ans.»
 
     Maurice SCHUMANN [sénateur], in SÉNAT, «Séance du 22 octobre 1997: Édification d’un monument au mont Valérien. Discussion des conclusions du rapport d’une commission», in Bienvenue au Sénat. Un site au service des citoyens, www.senat.fr/seances/s199710/s19971022/sc19971022002.html, en ligne en 2004.

     M. Maurice Schumann. — Je demande la parole.
     M. le président. — La parole est à M. Schumann.
     M. Maurice Schumann. — Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’Etat, mes chers collègues, le dernier survivant de l’ordre de la Libération sera enterré au mont Valérien. Puisque j’ai l’honneur d’appartenir à cet ordre, vous comprendrez sans peine que je prenne la parole pour remercier M. Badinter de son initiative et de ses propos, ainsi que ceux qui, dans un instant, vont lui apporter le soutien unanime du Sénat.
     En écoutant les orateurs qui m’ont précédé, j’évoquais la mémoire d’un de mes amis: Valentin Feldman. Nous avons su par un aumônier allemand, l’abbé Stock, qu’au moment même où les fusils du peloton d’exécution s’abaissaient vers lui, Valentin Feldman s’était écrié: «Imbéciles, c’est pour vous que je meurs!» C’est peut-être là le plus beau cri qui ait été poussé pendant la guerre.
     Nous donnerons toute sa signification au vote que nous allons émettre en nous rappelant ces paroles par lesquelles un grand intellectuel, une seconde avant d’offrir sa vie, a lié l’amour de la patrie et de la liberté à l’espoir de la réconciliation et à l’amour de la paix. (Applaudissements.)
 
     ANONYME, «French Resistance», in Spartacus Educational [«Education on the Internet & Teaching History Online»], www.spartacus.schoolnet.co.uk/FRresistance.htm, en ligne en 2004.

     «A group of scientists and lawyers working in Paris led by Boris Vilde began publishing a clandestine newspaper calling on the French people to resist the German occupation. The Musée de L’Homme group was infiltrated by a supporter of the Vichy government and as a result virtually all of the men and women involved with producing the newspaper were arrested and executed. It is claimed that one member of the group, Valentin Feldman, shouted at the moment of execution: "Imbeciles, it’s for you, too that I die."»
 
     Frédérique IMERLOUP, «Une photo mystérieuse» [page consacrée au résistant Jean-Jacques Désiront, appartenant au réseau de résistance du Musée de l’Homme, comme Valentin Feldman], imerloup.club.fr/page16-05-01.html, en ligne en 2004.

     ANONYME, «Valentin Feldman», in CLUB INTERNET DU COLLÈGE GEORGES-BRAQUE DE DIEPPE, École Valentin Feldman, www.ac-rouen.fr/ecoles/feldmann/historique.htm, en ligne en 2005 [d’où notre photographie; la municipalité de Dieppe, où Feldmann a donné son nom tant à une rue qu’à une école, a longtemps été communiste; la source ici utilisée a évidemment un caractère hagiographique].

     Valentin Feldmann était un Dieppois qui lutta et mourut face à l’occupant nazi.  
     Valentin Feldmann naquit à St Petersbourg le 25 juin 1909 et vécut en Russie jusqu’à l’âge de douze ans. La guerre qui le rendit orphelin. Débarqué à Marseille en 1921, il poursuivit de brillantes études à Paris au Lycée Henri IV où il reçut le premier prix de philosophie du concours général. Puis il devint professeur à Fécamp où il consacra toute son ardeur à la cause du peuple. Il s’engagea dans l’armée volontairement et après l’armistice il alla enseigner à Dieppe. Pendant un an il servit d’agent de liaison, s’employa au transport, à la diffusion et à la rédaction de tracts du parti communiste français. Puis il se consacra à la rédaction de journaux clandestins à Rouen. Mais vite il voulut partager les dangers et les difficultés de ses camarades. Aidé de l’un d’eux, il entreprit de briser la vitrine d’un photographe qui exposait les portraits de soldats et d’officiers allemands. (Ils laissèrent le mot suivant: «Quand nos prisonniers souffrent en Allemagne il est scandaleux de voir la gueule de leurs geôliers à l’honneur des vitrines françaises»). Mais un soir, victime d’un guet-apens, tendu a un autre que lui, il fut arrêté et incarcéré à la prison de Bonne Nouvelle. La grandeur de Valentin Feldmann s’affirma alors: malgré tous les coups, les interrogatoires, les punitions, jamais il ne céda. Pendant six mois il n’eut pas une plainte, pas un regret, pas une défaillance. Pendant six mois il resta pieds et poings liés. Ses voisins de cellule témoignèrent qu’il ne connut aucun moment de tristesse ou de crainte; il employa toute son énergie à réconforter et à soutenir ses camarades qui souffraient avec lui. Il fut fusillé au Mont Valérien le 27 juillet 1942. Au fond de sa cellule il griffonna de ses mains enchaînées «ma mort est la plus belle réussite de ma vie». Son nom est gravé sur la plaque commémorative du Musée de l’Homme à Paris et sur le monument au mort de Dieppe.
 
     Pierre-Frédéric CHARPENTIER [préparant à l’université de Paris I une thèse sur «Les intellectuels français face à la guerre de 1939-1940»], «Valentin Feldman» [contribution au Corpus Étampois relative à cet éphémère professeur de philosophie au collège d’Étampes], courriel du vendredi 17 décembre 2004, 11:05 [texte cité dans la présente page: www.corpusetampois.com/che-20-valentinfeldman2004charpentier.html, 2004].

     Valentin FELDMAN, Journal de guerre, Tours, Farrago, à paraître en 2006 [d’après Pierre-Frédéric CHARPENTIER].
 

Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
Source: la Toile en décembre 2004.
 
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