CORPUS HISTORIQUE ÉTAMPOIS
 
René de Saint-Périer
Étampes: les Guerres de Religion
[La grande histoire d’une petite ville, chapitre III] 
1938-1969

Jules Lepoint-Duclos: Notre-Dame (gravure sur bois, 1938)    

     La personnalité et l’œuvre du Comte de Saint-Périer ont dominé l’historiographie étampoise pendant la première moitié du 20e siècle. Sa Grande histoire d’une petite ville, Étampes, parue en 1938, reste à ce jour la seule synthèse complète publiée sur l’histoire de cette ville.
B.G.

Avertissement
Chapitre I.
Chapitre II. Chapitre III. Chapitre IV. Chapitre V. Chapitre VI. Chapitre VII. Chapitre VIII. Index. Table.
 
COMTE DE POILLOÜE DE SAINT-PÉRIER
LA GRANDE HISTOIRE D’UNE PETITE VILLE, ÉTAMPES

III. Les Guerres de Religion


 
CHAPITRE PRÉCÉDENT
TABLE DES MATIÈRES
CHAPITRE SUIVANT
III. Les Guerres de Religion


     Étampes magasin de vivres.Ravages des huguenots.Un prince palatin duc d’Étampes.Organisation de la défense.La Ligue et ses violences. La ville cinq fois assiégée.Henri IV à Étampes.L’apaisement.Ravaillac à Étampes.


Jules Lepoint-Duclos: Notre-Dame (gravure sur bois, 1938)      Nous avons vu que le duché d’Étampes fut retiré à Diane de Poitiers en 1559, quelques semaines après la mort du roi son amant. François II n’ayant régné qu’un an, c’est Charles IX, qui, en 1562, renouvelle le don du duché à Jean de Brosses, le mari d’Anne de Pisseleu, dont le dévouement aux trois rois qu’il servit ne semble pas avoir eu de défaillances, au milieu des troubles de l’époque. Il mourut en 1564 et les habitants d’Étampes lui firent un service solennel en l’église de Notre-Dame.

     Nous abordons maintenant une des plus douloureuses périodes de l’histoire de notre ville. Comme elle avait été victime de la lutte entre les Armagnacs et les Bourguignons, elle le sera de la nouvelle guerre civile qui va déchirer la France, pendant plus de trente ans, entre les catholiques et les protestants, armés les uns contre les autres non pas seulement par des querelles religieuses, mais encore par les ambitions personnelles de leurs dirigeants. La mort brusque d’Henri II, la jeunesse des deux rois qui lui avaient succédé, avaient éveillé, en effet, bien des aspirations rivales à la cour, les princes du sang, les représentants des vieilles familles, les grands chefs militaires convoitant chacun une part du pouvoir et cherchant à prendre une influence prépondérante auprès des enfants qu’étaient les rois, ainsi qu’auprès de leur mère Catherine de Médicis. A ces conflits d’intérêts [p.40] s’ajoutaient les discordes religieuses: les Bourbon, Antoine, roi de Navarre, père du futur Henri IV et son frère, Louis, prince de Condé, étaient calvinistes, les Montmorency étaient les uns catholiques, les autres protestants, comme Coligny, les Guise étaient des catholiques intransigeants. En face de ces basses intrigues, d’un fanatisme qui s’exaspérait à chaque incident et aussi du goût des combats, de l’a venture, du pillage, qui sommeille toujours dans l’homme et si particulièrement développé à cette époque, il eût fallu l’ascendant d’une grande figure de roi, comme Henri IV quelques années plus tard. Mais la carence d’une autorité souveraine devait fatalement conduire à la guerre civile.

     On sait que le premier épisode de cette guerre fut la conjuration d’Amboise, en 1560. Leur complot ayant échoué, les conjurés protestants, entraînés par le prince de Condé, en reformèrent aussitôt un autre et c’est à Étampes qu’il fut déjoué. En effet, le messager ordinaire de Condé, un Basque nommé Jacques La Sague, traversait la ville pour porter des ordres au vidame de Chartres. affilié au parti protestant, lorsqu’il fut reconnu et arrêté. Mais rien ne pouvait plus mettre obstacle à la guerre. «De la goutte de sang versé à Amboise, avait prédit Calvin, découleraient des fleuves qui inonderaient la France». Les tentatives d’apaisement, les appels à la tolérance que fit Catherine de Médicis, la régente, sous l’influence du chancelier Michel de 1’Hospital, restèrent sans effet.

     Antoine de Bourbon, bien que calviniste, était lieutenant général de l’armée royale. L’objectif principal de chacun des partis étant comme toujours la prise de Paris, il organisa une partie de sa défense et le ravitaillement de ses troupes dans la ville même d’Étampes, qui permettait de garder une des routes de Paris. En avril et mai 1562, il y installa une nombreuse garnison et un magasin de vivres, destiné non seulement à celle-ci, mais encore à toute l’armée lorsqu’elle traverserait la région. C’est ainsi que des mandements successifs ordonnent de réquisitionner tous les blés et les vins, tant des particuliers que des marchands, avec prohibition de vente et de sortie, d’établir la liste des vivres qui se trouvent «par toutes maisons», de convertir les blés en farine, de construire de nouveaux fours s’il y a lieu, de faire conduire à Guillerval, où l’armée du roi campe au mois de juin, 5000 pains cuits, avec avoine, foin et fourrage, de faire dresser des étapes de «pain, vin, chairs et avoine» pour le passage de 1200 chevaux pistoliers. En quelques mois, les malheureux habitants d’Étampes fournirent près de 1.000 quintaux de blé et 100. 000 livres de pain, sans compter l’avoine, le vin, le lard, l’huile, la chandelle, le bois. Ces réquisitions leur furent d’autant plus préjudiciables que les récoltes de cette année 1562 furent atteintes par des pluies continuelles et glaciales. Enfin, la peste qui ravagea une partie du nord de la France «jusqu’après la Saint-Rémy [p.41] (1 octobre) n’épargna pas notre pauvre ville. Et toutes ces privations furent vaines, puisque le prince de Condé s’en emparait le 13 novembre 1562. Pendant que l’armée royale était occupée au siège de Rouen, il s’était avancé d’Orléans vers Paris, après avoir joint à son armée des renforts allemands: plus de 3000 reîtres, gens de cheval armés de pistolets» et 4000 hommes de pied. Pithiviers lui ayant ouvert ses portes, le maréchal de Saint André, acquis aux Guise, se jeta dans Corbeil avec des troupes et crut devoir appeler à lui la garnison d’Étampes, le matin du 13 novembre. Le jour même, Condé était devant notre ville et la sommait de se rendre. Sans défense, elle dut céder. Pendant six semaines, elle fut occupée par les huguenots qui y commirent les pires excès. Ils avaient transformé les églises en écuries pour leurs chevaux et, s’il faut en croire une tradition fort vraisemblable, ce sont les reîtres allemands qui décapitèrent alors les admirables statues du grand portail de Notre-Dame. Mais le duc de Guise, ayant remporté la victoire de Dreux sur les protestants en décembre 1562, allait assiéger Orléans et la nouvelle de son prochain passage à Étampes mit en fuite les envahisseurs. Peu après, l’édit d’Amboise valut au moins quatre années de paix à la France, mais les hostilités reprirent bien avant que notre pays eût pu réparer le mal qui lui avait été fait. En septembre 1567, Condé et Coligny tentèrent de bloquer Paris où Charles IX s’était retiré. Claude de la Mothe, seigneur de Bonnelles, fut envoyé par le roi à Étampes en qualité de gouverneur de la ville et du château. Avec le concours de la municipalité, il créa huit corps de garde, mit tous les habitants sous les armes, aménagea les chemins de ronde à l’intérieur des murs, lit des réserves de vivres, de fourrages, de bois et de munitions, réquisitionna des lits, des tables, du linge, de la vaisselle, qui furent transportés au château. Tout cet effort demeura vain, comme les précédents. Le 17 octobre, le comte de Montgomery, commandant de fortes troupes qui venaient de prendre Janville-en-Beauce, sommait encore Étampes de se rendre. Les habitants refusèrent d’abord et s’efforcèrent à quelque résistance, mais bien tôt la ville était prise par escalade et le château se rendit. Les vainqueurs y installèrent une compagnie d’arquebusiers, «pour tenir en sujétion tout le voisinage». C’est lors de ce siège que les protestants, entre autres destructions, brûlèrent l’église et le couvent des Cordeliers, comme nous l’avons vu. Un nouveau monastère fut reconstruit par les Cordeliers, ainsi qu’une église, quelques années plus tard, grâce à des dons d’Henri III, de la noblesse et des habitants d’Étampes. Le bois nécessaire fut pris sur des arbres de la forêt de Dourdan, avec l’autorisation du roi.

     La prise d’Étampes fut pour les conjurés une victoire inutile. Battus quelques semaines plus tard, à Saint-Denis, ils durent abandonner toutes les places qu’ils tenaient dans le voisinage de Paris, et [p.42] parmi elles, Étampes. Mais les hostilités continuaient. Le roi et le duc d’Anjou, son frère, le futur Henri III, qui était lieutenant général du royaume, se préoccupèrent de renforcer la défense d’Étampes. Il y établirent de nouvelles garnisons, sous le commandement d’officiers éprouvés. Le bailli, Nicolas Petau, fut chargé d’organiser encore des réserves de grains, de rechercher les vivres cachés dans les maisons ou abandonnés par les ennemis. Le blé était déposé dans les greniers de l’hôtel Mesnil-Girault, rue de la Tannerie, ainsi appelé parce qu’il appartenait au chapitre de Sainte-Croix d’Orléans, possesseur de la châtellenie de Mesnil-Girault, au sud d’Étampes, dont il nous reste un beau vestige. Deux bourgeois furent élus par l’assemblée municipale pour y recevoir les blés, que tous les cultivateurs du bailliage apportèrent, mais dont ils ne furent payés qu’entre 1573 et 1579. L’armée royale vint camper quelque temps aux alentours, cherchant les moyens de dégager Chartres, que Condé assiégeait avec près de 30.000 hommes. La situation était grave pour le roi et Catherine de Médicis, suivant les conseils avisés de Michel de l’Hospital, offrit la paix, qui fut laborieusement conclue à Longjumeau en mars 1568. Petite paix, en vérité, ou paix fourrée, selon les noms significatifs qu’elle reçut, car, six mois après, la guerre était rouverte. Au moins, notre malheureuse région fut épargnée par ces nouvelles luttes qui se déroulèrent au sud de la Loire. Elle semble également avoir échappé aux horreurs de la Saint-Barthélemy, aucun document n’en faisant mention.

     On sait que Charles IX mourut peu après en 1574. Sous son règne, en 1566, une ordonnance importante, qui intéressait notre duché d’Étampes, avait été rendue à l’instigation du sage Michel de l’Hospital, pour régler les conditions des apanages: le domaine de la couronne était déclaré inaliénable et ainsi, les apanages ne devaient Jamais être regardés que comme un usufruit, la propriété en demeurant toujours à la couronne. Ils ne pouvaient être donnés aux femmes, mais devaient être réservés aux puînés mâles de la maison de France et revenaient au domaine par la mort du prince apanagiste sans postérité masculine, par son avènement au trône ou par confiscation pour forfaiture. Une seule dérogation était prévue: en cas de guerre, l’apanage pouvait être cédé contre la remise d’une somme d’argent nécessitée par les circonstances, mais avec faculté perpétuelle de rachat parla couronne. Cette prudente mesure permit au Parlement de s’opposer à la concession du duché d’Étampes faite d’abord par Charles IX, au mépris de sa propre ordonnance, en faveur de Sébastien de Luxembourg, vicomte de Martigues. Malgré les lettres de jussion adressées par le roi au Parlement, celui-ci maintint son opposition. Une autre donation irrégulière du duché d’Étampes demeura également fictive, celle que fit Henri III, en 1576, à Diane de France, fille naturelle d’Henri II, femme de François de Montmorency. [p.43]

     Mais sous Henri III, l’anarchie gagna tout le royaume. Les protestants groupés dans l’Union calviniste, réunissaient des assemblées, levaient des impôts, commençaient de former un État dans l’État. Les catholiques modérés, révoltés devant les massacres et les ruines et s’inspirant de la tolérance de Michel de l’Hospital, avaient constitué, contre les catholiques intransigeants, le parti des Politiques ou des Malcontents, sous la direction du dernier frère d’Henri III, le duc d’Alençon. En face de ces divisions, le roi, sans autorité personnelle, ne savait quel parti prendre. Les calvinistes s’étant unis au duc d’Alençon, firent appel avec lui au comte Palatin, dont ils reçurent 20.000 hommes, sous la conduite de son fils Jean Casimir, qui pillèrent une partie de la France jusqu’au Bourbonnais, et ils marchèrent de concert sur Paris. Le roi, effrayé d’une telle menace et hors d’état de résister, signa en 1576, près de Sens, un traité dit la paix de Monsieur qui accordait de nombreux avantages aux protestants, augmentait l’apanage de Monsieur, duc d’Alençon, et abandonnait à Jean Casimir Palatin le duché d’Étampes. Au milieu de pareils désordres, le Parlement ne s’opposa pas à cette donation, pourtant moins acceptable qu’aucune autre. Mais dès 1577, Jean Casimir, mécontent de n’avoir pas touché les paiements convenus, fit remettre au roi tous les dons qu’il avait reçus de lui et ainsi le duché revint à la couronne. Deux ans plus tard, le roi se conformait cette fois à la fameuse ordonnance de Charles IX relative aux apanages: le «cas de guerre» ne cessait pas d’exister malheureusement et permit d’engager le duché d’Étampes, avec faculté de rachat, à la duchesse de Montpensier, fille de François de Guise, contre un prêt au roi de 100.000 livres, dont elle devait toucher l’intérêt au denier douze, c’est-à-dire à 8,33%, sur les revenus du duché. Henri III dut être en état de racheter bientôt le duché d’Étampes, puisqu’il le donna dès 1582 à sa sœur Marguerite de Valois, pour compléter la dot qui lui avait été promise au moment de son mariage avec Henri de Bourbon, roi de Navarre, le futur fleuri IV.

     La paix de Monsieur, par sa tolérance à l’égard des protestants, avait violemment mécontenté les catholiques qui formèrent à leur tour une ligue composée d’associations locales, répandues peu à peu dans une grande partie de la France; celle d’Étampes ne fut constituée qu’en 1587. Mais Henri III s’était proclamé le chef de la Ligue dès 1577 et les calvinistes avaient aussitôt repris les armes. Jusqu’en 1580, la guerre fut presque constante; cependant elle épargna notre région.

     En 1584, la mort du duc d’Alençon ralluma les passions, le chef des calvinistes, Henri de Bourbon, devenant ainsi l’héritier de la couronne et les catholiques refusant d’admettre qu’un protestant pût être un jour le roi. Henri de Guise surexcita l’ardeur des catholiques, [p.44] qui servait son ambition d’accéder au trône à la mort d’Henri III: il donna une nouvelle impulsion à la Ligue, s’allia avec le roi d’Espagne Philippe II, leva des troupes dans tout le royaume et obtint du roi la révocation de tous les édits de tolérance en faveur des calvinistes. Une nouvelle guerre devenait inévitable. Henri III ordonna de s’y préparer aux villes qui lui étaient restées fidèles. Étampes était encore de celles-là. En mars 1585, Philippe Hurault, comte de Cheverny, gouverneur d’Orléans et de Beauce, avertit les habitants d’Étampes qu’ils devaient veiller à la sûreté de leur ville. On décida de fermer cinq portes, en les murant, et d’en laisser seulement trois ouvertes, celles de Saint-Martin, de Saint-Jacques et de Saint-Pierre. Le château était gardé jour et nuit par des habitants, choisis chaque jour par le maire et les échevins et commandés par le sieur de Blaville, capitaine. Le roi leur mande le 21 avril: «qu’il juge leur ville très importante pour le bien de son service et qu’ils ne doivent permettre à aucune troupe d’y entrer sans son exprès commandement signifié par lettres signées de sa main». Peu de temps après, le comte de Cheverny informe les habitants, de la part du roi, qu’ils doivent lui désigner un nouveau gouverneur pour leur ville, soit que le sieur de Blaville ait été inférieur à sa tâche, soit qu’on ne voulût pas laisser le même homme longtemps dans sa charge par crainte des défaillances ou même des trahisons. Les habitants proposèrent au roi le seigneur de la Mothe-Bonnelle, qui avait déjà préparé la défense en 1567. Il fut agréé et la municipalité lui remit le soin d’organiser la garde du château, qu’elle assumait jusqu’alors au moyen des dizaines: dix hommes étaient placés en sentinelles et remplacés par dix autres, toutes les quatre heures, nuit et jour. Les habitants, comme le maire et les échevins eux-mêmes, firent preuve de la plus grande discipline, qui trouva sa récompense dans le fait que les hasards de la guerre laissèrent leur ville à l’abri des combats pendant quatre ans. Elle n’eut à subir que des passages de troupes ou des alertes, lorsque les Allemands et les Suisses, appelés par les calvinistes, s’étendirent à travers toute la Beauce. Étampes avait gardé du précédent passage des reîtres de cuisants souvenirs, aussi les habitants étaient-ils résolus à tenir bon. Ils firent enlever toutes les échelles des faubourgs pour interdire l’escalade des murailles et ils reçurent des renforts de l’armée royale, commandés par le seigneur de Sainte-Marie. Mais la bataille se livra dans Auneau, où le duc de Guise infligea une sanglante défaite aux Allemands et aux Suisses, le 24 novembre 1587, puis, il se retira dans Étampes où il fit rendre des actions de grâce. La victoire d’Auneau permit au roi d’obtenir de ces troupes étrangères le serment de rentrer dans leur pays, ce qui serait exécuté sous son autorité «sans aucun déplaisir pour elles». Ce serment fut reçu par le seigneur d’ Inteville, au-dessus de Chalo-Saint-Mard, et dans la plaine du grand Chicheny, où les [p.45] Suisses s’étaient rangés en bataille. Ils s’engagèrent «par acclamation militaire et lévement de mains» et leurs colonels signèrent l’acte dressé à cet effet par deux notaires royaux d’Étampes, le 2 décembre 1587.

     Quelques autres succès remportés ailleurs par Henri de Guise, et présentés comme d’éclatantes victoires, enflammèrent les Ligueurs. Ils fomentèrent des émeutes à Paris contre le roi. Pour les apaiser, Henri III dut recourir au duc de Guise et bientôt après, il signait sous la contrainte, à Chartres, en juillet 1588, un traité avec les chefs de la Ligue, qui leur accordait de nouvelles concessions et ordonnait l’entière extirpation de l’hérésie. Le traité fut publié en forme d’édit, juré solennellement dans la cathédrale de Rouen et envoyé dans tous les bailliages pour être aussi solennellement juré par les habitants. Ceux d’Étampes adhérèrent ainsi à la Ligue le 19 août 1588: les ecclésiastiques, le tiers état et le bailli, Michel de Veillard, sans aucune protestation, mais les autres gentilshommes, avec des restrictions sur «l’obligation de leurs biens, qu’ils n’entendaient pas être compris par leurs signatures». On fit même jurer des enfants, Urban de Poilloüe et son frère Abel, âgés de dix-sept et treize ans, signèrent à la place de leur père, mort en 1582.

     Le roi avait perdu toute autorité: aux États généraux, qu’il convoqua à Blois en octobre 1588, Henri de Guise apparut comme le vrai souverain. Ainsi s’explique la criminelle décision d’Henri III: la mort de son rival lui sembla la seule délivrance possible de l’étau dans lequel il s’était laissé prendre. Les deux Guise assassinés, les États généraux saisis d’épouvante et bientôt congédiés, il put dire: «A présent je suis roi», mais roi d’un malheureux royaume, soulevé de révolte, déchiré de fanatisme, ivre de violences et de meurtres. Notre ville, pacifique et soucieuse de justice, fut victime de ces fureurs. Les Ligueurs, à la suite de l’assassinat de leurs chefs, avaient déchaîné à Paris une véritable insurrection contre le roi et aussitôt organisé un gouvernement révolutionnaire, le Conseil des Seize, composé de représentants élus des seize quartiers de Paris. Voulant s’assurer de la ville d’Étampes, grenier de la Beauce toujours convoité, qui leur facilitait, en outre, la communication avec Orléans, ils y installèrent une garnison, sous le commandement d’un de leurs partisans exaltés des environs, François d’Izy, seigneur de la Montagne. Il fit emprisonner Nicolas Petau, l’ancien bailli, avec ses enfants, comme mauvais catholique, puis, le prévôt, Jean Audren, sous le même prétexte. Mais les habitants d’Étampes donnèrent un bel exemple de courage par leur protestation: ils témoignèrent que Nicolas Petau s’était dévoué à la chose publique pendant trente-six ans et qu’il était bon catholique, de même qu’Audren. Puis, il convoquèrent une assemblée spéciale, le 18 février 1589, pour refuser un successeur d’Audren, Simon de Lorme, avocat au Parlement qui avait été [p.46] envoyé d’office comme nouveau prévôt par le Conseil des Seize. Henri III, pour reconquérir son royaume, s’était réconcilié avec Henri de Navarre, en avril 1589, et tous deux s’avancèrent sur Paris avec une armée de 35.000 hommes de pied et 5.000 cavaliers. Lorsque cette nouvelle parvint à Paris, le duc de Mayenne, dernier des Guise, qui avait été fait lieutenant général du royaume par le gouvernement révolutionnaire, renforça la garnison d’Étampes et la mit sous le commandement d’un autre ligueur, le seigneur de Pussay, le château devant être défendu par le capitaine de Saint-Germain. Mais ces troupes étaient bien trop insuffisantes pour résister à la forte armée qui mit le siège devant Étampes le 23 juin 1589. Deux batteries furent installées, l’une à l’extrémité de la ville, du côté d’Orléans, l’autre sur la colline en face du château pour abattre la courtine qui le couvrait. La première ayant bientôt ouvert une brèche, l’assaut fut donné et la place fut prise, malgré quelque résistance des défenseurs, qui furent faits prisonniers, puis, le château se rendit. La ville fut livrée au pillage pendant trois jours; les officiers royaux qui se trouvèrent convaincus de rébellion furent punis et le seigneur de Saint-Germain, capitaine du château, qui avait été page d’Henri III, eût été pendu, quoiqu’il fût gentilhomme, si le duc d’Épernon, son ami, ne lui eût obtenu la grâce du roi. Enfin, nous dit le bon Fleureau, «le viol ne fut pas permis, néanmoins, il y eut quelques femmes qui ne l’évitèrent point».

     Pendant le court séjour que fit Henri III à Étampes, il y reçut la nouvelle qu’il était menacé d’excommunication s’il ne consentait à une pénitence pour le meurtre du cardinal de Guise et s’il ne libérait pas les prélats emprisonnés par lui. Il en fut si affecté qu’il refusa de manger durant vingt-quatre heures. A quoi, le roi de Navarre, qui connaissait les hommes, lui dit: «Sire, le plus sûr remède est de vaincre, ainsi, nous serons absous. Mais si nous sommes vaincus, nous demeurerons excommuniés, voire même aggravés». Après s’être emparés de Châtres (aujourd’hui Arpajon), de Pontoise, 1’Isle-Adam, Creil, Poissy, ils mirent le siège devant Paris, mais c’est alors qu’Henri III fut assassiné, le 1er août, par le moine Jacques Clément. On sait qu’Henri IV devait mettre près de cinq ans à conquérir son royaume.

     En juillet 1589, un nouveau gouverneur avait été envoyé à Étampes, le seigneur Paul Touzin, pour y tenir garnison avec trois compagnies. Tous les habitants avaient prêté serment de fidélité au roi Henri III et ils se mirent en demeure de réparer la brèche faite par lui à leurs murs. Touzin avait été remplacé par le capitaine Rigault, dans le commandement de la place, lorsqu’elle fut encore assiégée le 20 octobre 1589, mais par les Ligueurs cette fois. En effet, le duc de Mayenne, à la mort d’Henri III, avait vu son armée s’accroître de tous ceux qui abandonnaient Henri IV, puisque la fortune semblait [p.47] lui devenir hostile. En outre, la tolérance et le désir d’union du roi de Navarre ne pouvaient être compris que d’une faible élite et les innombrables fanatiques des deux partis se dressèrent contre lui. En quelques jours, son armée fut réduite de moitié. Il dut lever le siège de Paris, mais il demeura en Normandie, au lieu de se retirer dans le Midi où se trouvaient les vieilles troupes calvinistes, comprenant bien que la conquête de Paris devait être son objectif essentiel. Le duc de Mayenne, resté maître de la capitale, étendit ses forces au tour d’elle et, comme il fallait des vivres, Étampes fut une des premières villes attaquées. Elle capitula, bien que le capitaine Rigault fût un brave, mais il avait une garnison trop réduite et il se rendit, au moins avec composition, au lieutenant du duc de Mayenne, Chrétien de Savigny, seigneur de Rosne. Néanmoins, d’abominables exécutions furent commises: le bailli Nicolas Petau fut tué et le prévôt Jean Audren, nous dit un témoin, «encore plus maltraité», poursuivis par la rancune des Ligueurs, qui déjà les avaient fait emprisonner l’année précédente, comme mauvais catholiques. L’on sait, par ailleurs, que Jean Audren fut pendu par les soldats le 23 octobre. C’est donc à tort que ces deux meurtres furent imputés aux protestants de l’armée d’Henri de Navarre, comme l’a fait un historien moderne.

     Cependant, Henri IV commençait à donner la mesure de sa vaillance, de son esprit organisateur et de sa valeur militaire. Il avait battu le duc de Mayenne dans une série de combats à Arques, à la fin de septembre 1589. Mayenne s’étant retiré en Picardie, le roi ordonna de rompre les ponts de l’Oise pour couper la route de Paris au vaincu et il vint assiéger Paris, le 31 octobre. Mais un pont n’avait été détruit qu’à moitié: en quelques heures il fut rétabli, Mayenne passa avec son armée et pénétra dans Paris. Malgré quelques succès dans les faubourgs, le roi jugea plus sage de se replier, dès le 3 novembre, sur Linas et le 5, il campait sous les murs d’Étampes. Alexandre de Castelnau, comte de Clermont-Lodève, occupait la place pour la Ligue avec cinquante gentilshommes et quelques gens de guerre. Il dut renoncer à toute résistance, les habitants «ayant abandonné la garde pour ne pas tenir contre leur roi», et se rendit à la première sommation. Cette fois, il n’y eut ni sang versé, ni pillage, quoique les troupes «du roi sans couronne et général sans argent» n’eussent pas de solde. Henri IV demeura sept jours à Étampes. La tradition veut qu’il ait séjourné à Brières-les-Scellés, dans le petit château, dont une partie, devenue une ferme, subsiste encore, en particulier une belle salle du XVIe siècle, qui entendit sans doute les joyeux propos du Béarnais. Les habitants d’Étampes profitèrent du séjour du roi pour lui demander l’autorisation de détruire leur château, qui, faisant d’Étampes une ville dite «forte», avait entraîné pour elle tant de combats, de ruines et de misères. Henri IV, non seulement consentit à la démolition du château, mais fit entreprendre [p.48] la destruction de ce qui restait des murailles. II acheva de donner la preuve de son libéralisme en permettant aux habitants de rester neutres dans la lutte qu’il poursuivait.

     Un conseil du roi fut tenu à Étampes à ce moment, réunissant des princes du sang, les maréchaux de France, des officiers et des gentilshommes du royaume. Un envoyé de la reine Louise de Lorraine, la veuve d’Henri III, y vint de sa part réclamer justice de l’assassinat de son mari, en priant que fussent recherchés les complices éventuels de l’assassin, Jacques Clément, qui avait été massacré sur place et ainsi, n’avait pu être interrogé. A la lecture de ce message, le hardi Béarnais se demanda-t-il si le sort d’Henri III ne lui était pas réservé? C’est possible, en ce temps où le péril de mort était partout, mais il n’était pas homme à s’y arrêter, lui qui répondait aux reproches de Sully sur sa témérité: «C’est pour ma gloire et pour ma couronne que je combats ma vie ne me doit être rien à ce prix». Mais comment cette requête de la reine Louise, adressée à Henri IV et reçue à Étampes précisément, ne nous ferait-elle pas songer au même destin tragique qui devait atteindre vingt ans plus tard le malheureux roi? Son assassin eût été, lui aussi, massacré dans la rue de la Ferronnerie, si d’Épernon, comme saisi d’un souvenir, n’avait crié qu’on se gardât bien de tuer le régicide, ce régicide qui avait pris sa fatale décision dans notre ville même.

     Henri IV poursuivit sa route vers Orléans. Nous ne le suivrons pas dans sa difficile et glorieuse conquête. Mais nous signalerons qu’au moment où parvint à Étampes la nouvelle de l’intervention de plus en plus active du roi d’Espagne dans les affaires de France, de l’installation d’une de ses garnisons dans Paris pour aider les Ligueurs, enfin, de ses visées sur le trône même de France pour sa fille, les habitants furent si émus qu’ils se réunirent en une assemblée générale. Ils jurèrent d’une commune voix de vivre et mourir en bonne union et concorde et de se maintenir sous l’autorité de la seule couronne de France.

     En 1590, le duc de Mayenne leur demanda de constituer un magasin de vivres pour son armée et de lever une contribution: ils purent refuser l’un et l’autre en alléguant leur misère, qui n’était que trop réelle. Mais il furent obligés d’accueillir une garnison pour assurer la liberté de la route de Paris à Orléans et la subsistance de l’armée espagnole voisine sur le pays d’alentour.

     On sait que Paris se rendit enfin à Henri IV le 22 mars 1594. Mais il restait des Ligueurs impénitents: nous en citerons un exemple caractéristique qui intéresse quelque peu notre ville. C’est celui de Marie Baron, femme du jurisconsulte René Choppin, seigneur d’Arnouville-en-Beauce, qui furent enterrés tous deux d’abord à Paris, mais dont la pierre tombale est conservée maintenant au musée [p.49] d’Étampes. Marie Baron était une ligueuse si passionnée qu’à l’entrée d’Henri IV à Paris, elle se jeta par la fenêtre.

     Cependant, sous l’autorité du roi, si heureusement tempérée de bonhomie souriante, grâce à sa compréhension des hommes et au dévouement qu’il ne cessa d’apporter à son œuvre immense de reconstruction, après tant de ruines, l’apaisement se fit dans les esprits, l’ordre fut restauré et le relèvement s’accomplit peu à peu. Notre région nous offre une image de cette pacification, au moins sous une forme indirecte, puisque, comme les peuples heureux, elle n’a plus d’histoire jusqu’à l’aurore du règne de Louis XIV. Nous citerons, pourtant, un exemple local de l’entente survenue entre les partis, armés naguère dans une lutte sans merci. François de Prunelé, seigneur de Guillerval, blessé à Cérisoles en 1544, protestant convaincu, avait été tué en Beauce par les Ligueurs, en 1587, et sa propre fille Anne, épousa en 1596, Abel de Poilloüe, qui avait été cependant un des signataires de la Ligue à Étampes.

     Nous ne pouvons omettre non plus le passage de Ravaillac dans notre ville et notre région, qui n’est point une légende. On sait que l’assassin conçut longuement son projet. Après un premier séjour à Paris, en janvier et février 1610, où il n’avait pu approcher le roi, il rentra chez lui à Angoulême, puis en repartit le 11 avril, pour arriver à Paris vers le 25. De son aveu même, il ne tente plus alors de voir le roi; il s’installe dans une auberge du faubourg Saint-Jacques et, presque aussitôt son arrivée, dérobe dans une hôtellerie un couteau, dont il fait remplacer le manche de baleine par un manche en corne de cerf. Puis, brusquement, il semble abandonner sa criminelle intention et quitte Paris, au début de mai, pour rentrer à Angoulême. Il passe par Auvers-Saint-Georges et s’arrête au hameau de Chanteloup, où il brise la pointe de son couteau en l’introduisant dans l’essieu d’une voiture, comme pour s’interdire l’usage qu’il avait médité d’en faire. Il reprend sa route, traverse Étampes, mais arrivé au faubourg Saint-Martin, devant la statue de l’Ecce homo, en un petit carrefour qui occupait l’angle actuel de la rue de Saclas, il a, dira-t-il lui-même, une vision, qui le pousse brusquement à aiguiser son couteau sur une pierre. Alors, il reprend le chemin de Paris et son forfait s’accomplira le 14 mai.

     On sait que la tête de cette statue de l’Ecce homo, de si tragique mémoire, a été conservée et qu’elle est aujourd’hui au musée d’Étampes. [p.50]



 
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BIBLIOGRAPHIE

Éditions

Le Comte de Saint-Périer (Emile Bouneau, 1951) Couverture de l'édition séparée de La grande histoire d'une petite ville par le Comte de Saint-Périer (1938)     Édition princeps: René de SAINT-PÉRIER, La grande histoire d’une petite ville: Étampes [in-4° (16 cm sur 25); 143 p.; 8 gravures sur bois originales in-texto de Jules Lepoint-Duclos; 16 planches hors-texte dont deux croquis et 14 photographies originales de Jules Lepoint-Duclos; ouvrage couronne par l’Institut], Étampes, Édition du Centenaire de la Caisse d’Épargne (1838-1938), 1938 [AME, ADE]. Dont une réédition remaniée posthume à partir de 1964 dans le Bulletin Municipal d’Étampes.

     Réédition partielle corrigée et augmentée: Raymonde-Suzanne de SAINT-PÉRIER [éd.] & René de SAINT-PÉRIER [†1950], «La grande histoire d’une petite ville: Étampes» [réédition mise à jour publiée en feuilleton], in Étampes. Bulletin Official Minicipal 2 (janvier 1964), pp. 20-30; 3 (2e semestre 1964), pp. 24-29; 4 (hiver 1964-1965), pp. 25-31; 5 (janvier 1966), pp. 13-16; 6 (septembre 1967), pp. 13-15; 7 [et non 6 comme indiqué aux AME] (2e semestre 1967), pp. 9-11; 10 [et non 9 comme indiqué aux AME] (1er semestre 1969), pp. 17-19 [AME, ADE].


    
Réédition en fac-similé du texte de 1938: René de SAINT-PÉRIER, La grande histoire d’une petite ville: Étampes [20 cm; 140 p.; illustrations; reproduction en fac-similé de l’édition de 1938], Paris Le Livre d’Histoire [«Monographies des villes et villages de France»], 2004 [Cette réédition ne tient pas compte des remaniements posthumes et sa notice introductive est un plagiat de notre page bibliographique.]

     Édition électronique des seules gravures sur bois de Jules Lepoint-Duclos: Bernard GINESTE [éd.], «Jules Lepoint-Duclos: Monuments étampois (gravures sur bois, 1938)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cae-20-lepointduclos1938huitgravures.html, 2004.

     Édition électronique des seules photographies de Jules Lepoint-Duclos: Bernard GINESTE [éd.], «Jules Lepoint-Duclos: Monuments étampois (photographies, 1938)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cae-20-lepointduclos1938photographies.html, 2004.

    
Édition électronique intégrale: Bernard GINESTE [éd.], «René de Saint-Périer: Grande histoire d’une petite ville, Étampes (1957-1969)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-saintperier1938grandehistoire.html (9 pages web), 2005.

     Ce chapitre: Bernard GINESTE [éd.], «René de Saint-Périer: Étampes, les guerres de religions (1957-1969)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-saintperier1938grandehistoire03.html, 2005.

Sur le Comte de Saint-Périer

     Adrien GAIGNON, «Le Comte de Poilloüe de Saint-Périer» [notice nécrologique], in Bulletin de l’Association Les Amis d’Étampes et de sa région 7 (janvier 1951), pp. 117-119 [AME, ADE].
     Réédition partielle: BILLARD 1984, pp. 115-118.
     Réédition
numérique intégrale: Bernard GINESTE [éd.], «Adrien Gaignon: Le Comte de Poilloüe de Saint-Périer (nécrologie, 1951)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cpe-20-saintperier-gaignon1.html, 2004].

     Émile BOUNEAU, «Dernier portrait du comte de Saint-Périer (juillet
1950)», in Bulletin de l’Association Les Amis d’Étampes et de sa région 7 (1951), p. 120 [dont l’image au début de la présente page].

     Pour une bibliographie plus complète et évolutive: Bernard GINESTE [éd.], «Le Comte de Saint-Périer et son épouse: une bibliographie», in Corpus Étampois,http://www.corpusetampois.com/cbe-saint-perier.html, 2003.

Documents mis en ligne par le Corpus Étampois relatifs à cette période

     Le seizième siècle étampois (liste des documents et études mis en ligne sur le site du Corpus Étampois), http://www.corpusetampois.com/index-16esiecle.html, depuis 2009.


Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.

Source: L’édition de 1938 et ses remaniements posthumes édités par la Comtesse. Saisie et mise en page de Bernard Gineste, 2005.
    
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